La précarité du secteur agricole au Nord-Kivu est tributaire de la situation sécuritaire préoccupante, du manque des intrants, de l’absence des routes de dessertes agricoles et d’une mauvaise rémunération des agents engagés dans ce secteur.
Selon Placide MBUSA, jeune agriculteur, membre du Réseau des Ingénieurs Agronomes du Nord-Kivu, dans la saison culturale de 2019, « sur un champ d’un hectare, il a été difficile de récolter un sac de maïs ou de haricot. Pendant qu’il y a des jours, un champ d’une telle surface produisait plus de 5 sacs ». Cette maigre production est directement orientée vers la consommation domestique après le triage et séchage des produits de leurs champs. Pour avoir une grande production, il faut avoir des matériels industriels, se plaint un agriculteur de Rutshuru.
Une agriculture manuelle et domestique
Dans les territoires de Rutshuru et de Lubero, voire même dans le Masisi, les activités agricoles se font à la main nue. L’ingénieur Placide l’a observé, lorsqu’il s’est rendu sur le terrain dans le Lubero en passant par Rutshuru. « J’ai été émotionné de trouver une femme, la cinquantaine révolue en train de labourer des hectares avec la houe et la bèche ». Cette agricultrice ajoute l’ingénieur a comparé leur vie à l’enfer suite aux conditions difficiles de travail, ce qui impacte négativement sur leur production.
En plus de l’insécurité qui bat record dans les lieux où se pratiquent les activités champêtres, les agriculteurs ne peuvent plus accéder à leurs champs, de peur d’etre tués, violés ou ravis toute la production par les groupes armés dont les FDLR. La pacification de ces territoires pouvait contribuer à booster les activités agricoles, ajoutée au courage de cette population qui pratique l’agriculture dans les conditions inacceptables pour leur survie et ainsi contribuer à la baisse du prix des produits agricoles afin de renflouer le panier de la ménagère.
Les produits d’ailleurs nourrissent Goma
Une fois à Goma, surtout à la petite barrière, (entre Goma et Gisenyi), il s’observe un mouvement très intense de petits commerçants transfrontaliers. Selon le regard d’un observateur neutre, les congolais comme les rwandais, tous amènent leurs produits aux marchés de Goma, aucun colis des produits agricoles prend le sens contraire.
Parce que le Rwanda comme les autres pays de la région pratiquent l’agriculture intensive, avec des machines et des engrains chimiques pour avoir une production massive. Les produits agricoles qui font nourrir également Goma proviennent du Sud-Kivu (Idjwi et Kalehe) et du territoire de Masisi avec ses produits naturels selon les consommateurs.
Le prix aussi joue
Lorsque la production est grande le prix aussi baisse. Mais pour avoir une grande production il faut une garantie sécuritaire et l’amélioration des techniques agricoles. C’est là où revient le rôle de l’autorité qui doit tout faire pour la restauration de l’autorité de l’Etat dans les territoires de Rutshuru, Lubero, Masisi, Walikale, BENI … afin de suggérer à la population, la culture du « consommons localement ».
Signalons que, les patates douces, le riz, le maïs, le haricot, la pomme de terre, le manioc et le soja constituent les cultures vivrières de base de la province du Nord-Kivu. En 2017, le rapport annuel de l’IPAPEL stipule que, le rendement du manioc était au top avec 13.382 kilogrammes par hectare et le soja au bas de l’échelle avec 906 kilogrammes par hectare. Cependant, la relance du secteur agricole en province de 10% de production agricole est à elle-même à la hauteur de réduire à 7% le nombre de personnes vivant sous le seuil de la pauvreté, conclut l’Ir Placide.
Rodrigue KIHIMBA