Les sinistrés du volcan se plaignent de leur logement une année après !

Les sinistrés du volcan se plaignent de leur logement une année après !

Près de « 6.992 » personnes ont été jetées dans la rue par l’éruption du volcan Nyiragongo du 22 mai 2021. Curieusement, « 1. 610 » seulement, donc  23% des victimes  ont bénéficié d’un abri temporaire du Gouvernement Congolais. Les autorités officielles justifient  cet écart par la présence de faux sinistrés  dans les sites. Les sinistrés et  la société civile crient aux manœuvres dans l’octroi des abris temporaires  aux sinistrés et demandent une distribution équitable de l’assistance humanitaire aux sinistrés du  volcan Nyiragongo.

Plus de 3 500 habitations ont été détruites par l’éruption du Volcan Nyiragongo du 22 mai 2021. Les sinistrés sont les habitants de sept villages du Territoire de Nyiragongo, il s’agit notamment des villages: « Ngangi 1, Ngangi 2, Rukoko, Kabaya, Bushara, Kasenyi et Buhima ». Selon le rapport d’enregistrement effectué premièrement par les chefs locaux, les propriétaires des parcelles décimées (bailleurs)  et leurs locataires étaient bonnement identifiés.

Le site de Kahembe ebèrge les locataires comme les propriétaires des maisons sans abris provisoires.

Tableau N°1 présentant les villages, les bailleurs et locataires sinistrés

Villages ou quartiers Bailleurs Locataires Total
01 Ngangi 1 2006 1471 3477
02 Ngangi 2 20 4 24
03 Rukoko 580 650 1230
04 Kabaya 480 200 680
05 Bushara 567 40 607
06 Kasenyi 320 100 420
07 Buhima 550 4 554
08 Total 4523 2469 6992

 

Ce tableau stipule que, les sinistrés sont venus  des villages : Ngangi 1, Ngangi 2, Rukoko, Bushara, Kasenyi et Buhima. Parmi les sinistrés, les propriétaires des maisons sont au nombre 4 523 et les locataires au nombre de 2 469, ce qui donne le total de 6 992 personnes sinistrées qui devraient  bénéficier d’un abri temporaire[1].

Les sinistrés décrient  la distribution des abris

 Pendant que les autorités officielles reconnaissent deux sites: « Makao/Kibati et  Kanyaruchinya/Bujari », tous construits par la Croix Rouge en Territoire de Nyiragongo ; les sinistrés se plaignent  par contre qu’ils sont oubliés car Makao ne compte que 500 ménages et Bujari 180, le reste des sinistrés vivent dans des conditions inhumaines dans les sites de Kahembe et celui de Kisoko.

Tableau N°2  site de Kisoko se trouve dans la Commune de Karisimbi dans le Quartier Kasika en ville de Goma. Non loin de l’Eglise CBCA Katoyi.

Nombre Ménages
Ménages 175
Hommes

65

Femmes 175
Enfants 207
 

Total

 

447

 

Tableau N°3 site de Kahembe se trouve dans le territoire de Nyiragongo, non loin du bureau de la chefferie de Bakumu.

Nombre Ménages
Ménages 240
Hommes

75

Femmes 165
Enfants 350
Total 475  

Dans ces deux sites, les difficultés sont similaires  presque sur tous les plans. Les sinistrés disent qu’ils ne sont pas assistés par le Gouvernement Congolais depuis  juillet dernier. Ils dorment à même le sol, car la  majorité n’ont pas de matelas, ceux qui en ont, ce sont des matelas qui n’ont que  trop vieillis ; parfois courroies de transmission des maladies », indique  Kavira Rachel, la cheffe adjointe du camp Kahembe, une femme vivant seule, mère de six enfants dont  3 filles. Pour elle, « cette situation malheureuse est à la base des plusieurs maladies cutanées. Car nous sommes sans abris, sans eaux, sans toilettes, hommes comme femmes sommes souvent victimes des maladies d’origine hydrique».

De cette manière, renseigne-t-elle, quatre personnes sont mortes dans le site des sinistrés  de Kahembe : «  deux enfants morts par la malle nutrition et deux adultes par la famine », regrettait-elle lors de notre entretien[2].

 Une fois arrivé sur le site de Kisoko, ce qui frappe le regard, la présence des  maisons construites en  vielles bâches. La présidente adjointe de ce camp raconte tristement : «  une fois qu’il pleut la nuit, nous sommes obligés de nous mettre  debout et toutes nos histoires sont mouillées ». De la même manière, la chargée d’hygiène dans ce site, Katungu Kasiko Jeanine, explique avec larmes aux yeux «  les femmes dans ce camp n’ont pas des sous-vêtements, comme le camp n’a pas aussi d’eau, les femmes sont victimes des plusieurs maladies infectieuses, malheureusement sans prise en charge médical pour savoir à quel niveau se trouve le danger de ces maladies dans nos corps.  Nous mourrons à petit feu[3] ».

Ce qui aggrave la situation  des sinistrés dans ces  deux  sites, « Kisoko et Kahembe »,  est que, les sinistrés bien que locataires sont considérés comme de faux sinistrés. Non seulement ils n’ont pas droit à un abri temporaire, mais aussi ne reçoivent plus  d’assistance venant du gouvernement.

 Clivage locataires/bailleurs

Pour le gouvernement, ce sont les propriétaires des maisons décimées par la lave qui ont droit  à un abri temporaire. Ce sont les propriétaires des maisons qui occupent aujourd’hui les sites de Makao/Kibati et Bujari, explique un agent de la Division des Affaires Humanitaires trouvé sur le terrain.

Oubliant aussi la vulnérabilité des locataires qui avaient perdu comme leurs bailleurs tous leurs biens lors de l’éruption du Volcan.

Tableau N°4  sur le pourcentage des locataires et bailleurs sinistrés

Type de sinistrés Fréquence Pourcentage
Locataires 2 469 35.3%
Bailleurs 4 523 64.6%
Total 6 992 100%

 

Ce tableau montre que les propriétaires des  parcelles sont au  nombre de 4 523, donc 64.6% pendant que les locataires sont au  nombre de 2 469, ce qui équivaut à 35.3%. Et pourtant 1 610  personnes  seulement ont bénéficié des abris temporaires du Gouvernement, équivalent à 23%  des personnes sinistrées.

Les sinistrés qui vivent dans les sites de Kisoko et de Kahembe sont tous considérés par les autorités comme locataires, par conséquent ils ne doivent pas bénéficier d’abris provisoires. Ces derniers accusent les autorités d’injustes dans l’octroi des abris temporaires parce que parmi eux il y a aussi des bailleurs mais qui ont été oubliés dans la distribution des abris temporaires.

La famille Bazimazike Jacques et Eric Muhindo, tous propriétaires des maisons se trouvent aujourd’hui dans le site de Kayembe, oubliés au même titre que les locataires sans espoir de se trouver un abri temporaire comme plusieurs autres sinistrés. Ces derniers racontent « nos noms ont commencé à être oubliés lorsqu’une organisation sans capacité d’assister la totalité des sinistrés n’a pris que  « 3500 » personnes. Dès lors nos noms seront oubliés par toutes les autres organisations qui ont suivi, car elles se servaient de base, les listes de cette première organisation qui pourtant prenaient en charge les frais de loyer de quelques locataires. Pour confirmer qu’ils sont propriétaires des parcelles, le chef de leur localité, les notables et d’autres voisins le confirment.

[4]Étienne Kambale, coordonnateur de la thématique « Bonne Gouvernance » au sein de la société civile forces vives, déclare «  ce désordre observé aujourd’hui dans la distribution de l’assistance aux sinistrés était prévisible. Où est-ce qu’on a vu  un secrétaire général d’un ministère national venir superviser la distribution des biens aux sinistrés d’une catastrophe en province ? », Se demande-t-il.

Des efforts observés  

Bien que plusieurs sinistrés se plaignent de n’avoir pas eu un abri temporaire, beaucoup d’efforts ont été consentis quant à ce. Certains reconnaissent avoir reçu des espaces à construire par l’ancienne première dame,  Maman Olive Lembe.

Tout simplement sans moyens, ils  se disent où est ce qu’ils trouveront des matériaux pour construire car on leur avait seulement donné des terrains vides et pourtant ils avaient tout perdu lors de l’éruption volcanique.

les maisons des sinistrés construites par Innocent Balume sont encore vide , une année après.

Dans le même souci l’artiste musicien Innocent Balume, qui avait lancé un appel de fonds avait construit dix maisons en bois dans une clocture au Quartier Lac-Vert dans la Commune de Goma. Curieusement, ces maisons de 2 chambres, salon et une cuisine sont jusqu’à maintenant inoccupées, aucun sinistré ne se trouve dedans et pourtant ils passent des nuits presqu’à ciel ouvert. Les sinistrés accusent toujours les autorités qui les ont interdits d’entrer dans ces maisons, pourtant construites pour leur cause.

Interrogés les proches de l’artiste musicien disent que leur patron tient toujours à ce programme, d’ailleurs dernièrement lorsqu’il était à Goma il disait qu’il partait à la recherche des sinistrés qui pouvaient entrer dans ces maisons qui remplissent les conditions où les gens peuvent vivre.

Ces maisons avec 6 portes des toilettes dont deux pour la douche publique, construites par un particulier dans le cadre de l’éruption volcanique sont un modèle à suivre dans la gestion des victimes d’une catastrophe, conclut[5], Eric Muhindo, chef du site des sinistrés de Kahembe car selon lui les sinistrés sont aussi des personnes à respecter.

Les sinistrés vivent dans ces bâches malgré les intempéries.

Cosmas Mungazi

Cet article est réalisé  grâce à l’appui de CORACON.

[1] Chance Barambecha Fréderic, le chargé de communication  des sinistrés du site de Kayembe, alors enseignant à l’Institut Virunga Quartier, le 23 mai 2022, Goma, Nord-Kivu.

[2] Kavira Rachelle, Presidente adjointe du camp des sinistrés de Kayembe, entretien du 24 mai 2022  dans le site de Kayembe à Nyiragongo.

[3] Jeanine Katungu Kasiko dans un entretien à Kisoko, Goma 24 mai 2022

[4][4] Etienne Kambale, responsable de Bonne Gouvernance, interview  du 20 mai 2022 dans son bureau à Goma.

[5] Eric Muhindo dans une interview à Kahembe dans le territoire de Nyiragongo, le 25 mai 2022

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